Vanescere

2007

Encre et acrylique sur toile
152,6 × 213,5 × 3,4 cm (60 1/16 × 84 1/16 × 1 5/16 in)

Cette grande composition abstraite de l'artiste américaine d’origine éthiopienne Julie Mehretu est une œuvre clé dans son œuvre. Elle constitue un moment charnière de sa trajectoire quand, en 2007, elle délaisse pour un temps l'usage de la couleur et que les notations graphiques qui parcourent jusqu'à saturation la surface de la toile se font plus expressives et gestuelles. Julie Mehretu s'attèle à cette œuvre lors d'une résidence à l'American Academy de Berlin. 

Elle incorpore une grande variété d'images sources et de diagrammes architecturaux et cartographiques dans le processus de conception et dans les "sous couches" de l'œuvre. Ici elle a tiré son inspiration des Buddhas de Bamiyan, trois statues monumentales de Buddha excavées dans la falaise d'Afghanistan, tristement célèbres pour avoir été entièrement détruites par les talibans en 2001, les niches dans lesquelles elles avaient été creusées restant les seuls témoins de leur absence. Dans un entretien donné à l'hebdomadaire New Yorker, l'artiste revient sur la genèse de cette toile : après avoir appliqué des formes et éléments colorés par dessus un ensemble de diagrammes et de marques graphiques, elle estime que : «la couleur avait détruit tout le dessin en noir et blanc qui se trouvait en dessous. J'ai donc sablé toute une section au milieu du tableau, je suis allé au fond de mon atelier pour le regarder, et le tableau était terminé ! L'effacement était devenu l'action principale, le vide faisait se produire toutes ces autres choses». 

Ce geste radical d'effacement, dont la trace est visible au centre de la toile, réorganise ainsi les forces et les tensions exprimées par la toile. S'il peut rappeler ceux d'autres artistes tels que Robert Rauschenberg [Erased De Kooning Drawing, 1953] ou Jean Michel Basquiat [Defacement, 1983] qui se mesurent pour le premier au dessin d'un autre et pour le second à la défiguration d'un visage humaine, ce geste fait également écho à violence iconoclaste qui a pris les Buddhas de Bamiyan pour cible. "Vanescere" ["Disparaître" en latin] inaugure une série d'œuvres de grands formats où Julie Mehretu fait un usage extensif et quasi exclusif de variations de gris et où son vocabulaire graphique s'enrichit de gestes plus incisifs, dans un affrontement physique et spontané avec la toile.

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