Ο Θεός μαύρο

2015

Greek marble sarcophagus, Roman, late 2nd century CE; poplar Virgin of the Annunciation, ltaly, ca. 1350; and cochineal dyed silk.

Œuvre : 177,5 x 57 x 52 cm, 100 kg
Element : 66,5 x 48,43 x 43 cm
Element : 120 x 46 x 29 cm

Danh Vo tire de son expérience personnelle de citoyen danois et fils de réfugiés vietnamiens catholiques, les thèmes qui sous-tendent son œuvre : l’histoire et sa temporalité, les conflits géopolitiques, le catholicisme, ainsi que la circulation des gens ou des choses – autant d'éléments qui constituent l'identité que l'artiste considère comme multiple et malléable. En collectionneur d’objets, il compose ses œuvres à partir de matériaux historiques préexistants qu’il fragmente et réassemble, produisant ainsi une sorte de compression temporelle en même temps qu’une réécriture de l’histoire.

Pour réaliser l’œuvre Ο ΘΕΌΣ ΜΑΎΡΟ, l’artiste a réuni deux objets sculptés d’origines et de nature différentes : la partie supérieure est composée d’une Vierge de l’Annonciation en peuplier d’Italie qui date d’environ 1350 ; la partie inférieure d’un sarcophage romain en marbre de la fin du IIe siècle. Par cet assemblage hybride de matériaux mêlant histoire, patrimoine culturel et religion, l’œuvre évoque la double signification de l’acte de possession – à la fois dans le sens démoniaque et dans le sens colonial de l’appropriation.

Parce qu’elle résulte d’un geste de démembrement et de profanation du sacré, la statue de Danh Vo est celle d’un corps possédé, au même titre que la jeune protagoniste du film d’horreur The Exorcist (1973, réalisé par William Friedkin) possédée par le démon Pazuzu, une divinité mésopotamienne du 1er millénaire avant JC. Le titre de l’œuvre Ο ΘΕΌΣ ΜΑΎΡΟ (« dieu noir » en grec) l’inscrit par ailleurs dans la série d’œuvres où Danh Vo fait directement référence aux dialogues du film. Le geste de découpage et d’assemblage de l’artiste peut ici également s’apparenter à une critique de certains systèmes d’acquisition d’objets qui prennent la forme de réquisitions violentes, dans un monde où le marché des biens culturels fait parfois écho à une forme de domination géopolitique. Le corps démembré figure alors celui du sujet colonisé qui, selon la pensée de Frantz Fanon, aurait perdu avec ses membres toute autonomie.

Cette œuvre a été intégrée à une installation plus vaste - Tropeaolum - exposée dans l’espace de la rotonde à la Bourse de Commerce – Paris entre février et avril 2023.
 

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