Untitled (mirror)

2013

Miroir en verre avec cadre en bois et plâtre, tissu

191,8 × 96,5 × 29,2 cm

Un grand drapé de tissu sombre, voile sali et troué, dont la maille rappelle aussi le tulle ou encore le filet, masque la surface d'un miroir doré, au décor très ornementé, dont seules les extrémités découvertes laissent entrevoir le faste. Ces matériaux de la précarité ou de l'opulence, sont tout sauf anodins, tout comme est signifiante l'occultation du pouvoir réfléchissant du miroir. Le voile annihile en effet l'expérience spéculaire, son pouvoir paradoxal également : s'il n'était désactivé par cette mise en scène, le miroir continuerait de renvoyer l'image d'une fausse réalité, une réalité inversée sous l'effet de ce décorum occidental, d'un point de vue occidental. Sous l'angle des mystiques et traditions africaines, le miroir occulté perd aussi son pouvoir, celui – chamanique, divinatoire, mémoriel - de révéler les spectres comme les ancêtres, celui de révéler la vérité. Œuvre des contraires, Untitled (mirror) dégage une poésie troublante et une inquiétante beauté.

David Hammons crée des compositions d'objets par lesquels il contribue « à fonder une iconographie du monde précaire ». Si Duchamp constitue pour lui une référence primordiale, Hammons, lui, recherche les objets pour leur signification culturelle singulière et nous oblige à nous confronter « à la population liée à cette vie quotidienne, ainsi qu'au sens et à l'importance à lui accorder » pour reprendre les mots d'Elena Filipovic. La voix de l'artiste crée des turbulences, elle est à la fois celle d'un oracle des fissures raciales et identitaires à l'œuvre dans la société, et celle d'un esthète, jouant savamment avec l'histoire de l'art.

Cette œuvre a été présentée pour la première fois en 2021 par la Collection Pinault dans l'exposition inaugurale de la Bourse de Commerce, intitulée « Ouverture ».

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